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Le LHC, pour la première fois, plus froid que l’espace intersidéral

Genève, le 10 avril 2007. Le premier secteur du Grand collisionneur de hadrons (LHC) du CERN1 à être refroidi a atteint une température de 1,9 K (‑271°C) – plus froid que l’espace intersidéral ! Ce secteur, qui ne représente pourtant qu’un huitième de l’anneau du LHC, devient ainsi la plus grande installation supraconductrice du monde. La totalité de l’anneau de 27 kilomètres du LHC doit être refroidi jusqu’à cette température afin que les aimants supraconducteurs qui guident et focalisent les faisceaux de protons restent à l’état supraconducteur, un état qui permet au courant de circuler sans résistance, créant un champ magnétique puissant et dense dans des aimants relativement petits. Guider les deux faisceaux de protons alors qu’ils se déplacent à une vitesse proche de celle de la lumière, incurver leur trajectoire le long de l’anneau accélérateur et les focaliser aux points de collisions n’est pas chose facile. Au total, ce sont 1650 aimants principaux qui doivent fonctionner à l’état supraconducteur : une prouesse technique incommensurable. « Cette mise en froid constitue la première grande étape dans la validation technique d’une portion complète du LHC » explique Lyn Evans, chef du projet LHC.

La procédure de refroidissement se déroule en trois temps, entrecoupés d’une multitude de tests et de contrôles approfondis. Durant la première phase, le secteur est refroidi jusqu’à 80 K, soit juste au-dessus de la température de l’azote liquide. À cette température, la contraction thermique finale du matériau atteint 90%, ce qui représente une rétraction des structures en acier de 3 mm par mètre. Chacun des huit secteurs mesurant environ 3,3 kilomètres de longueur, la rétraction est donc de 9,9 mètres. Pour compenser un phénomène de cette ampleur, des dispositions ont été prises en des endroits spécifiques (installation de soufflets de dilatation pour les conduites et jeu au niveau des câblages par exemple). Des tests sont en cours afin de s’assurer qu’aucun matériel ne cassera pendant le refroidissement des équipements.

Pendant la deuxième phase, le secteur est refroidi jusqu’à 4,5 K à l’aide de gigantesques réfrigérateurs. Chaque secteur dispose de son propre réfrigérateur et chacun des aimants principaux est rempli d’hélium liquide, le réfrigérant de choix pour le LHC car l’hélium est le seul élément à rester à l’état liquide à une température aussi basse.

La dernière phase fait intervenir un système de pompage complexe pour abaisser la pression du bain d’hélium bouillant et refroidir les aimants jusqu’à 1,9 K. Pour parvenir à une pression de 15 millibars, ce système combine des compresseurs centrifuges hydrodynamiques fonctionnant à basse température avec des compresseurs volumétriques à température ambiante. Le refroidissement à 1,9 K améliore sensiblement l’efficacité des matériaux supraconducteurs et la capacité réfrigérante de l’hélium. À cette température, l’hélium devient superfluide, s’écoule quasiment sans viscosité et permet d’accroître la capacité de transfert de chaleur. 

« L’excitation monte. Depuis plus de dix ans, des hommes et des femmes conçoivent, construisent et testent séparément chaque partie de ce secteur et nous avons à présent la chance de tester l’ensemble pour la première fois », déclare Serge Claudet, chef de l’équipe chargée de l’exploitation cryogénique. Pour en savoir plus et suivre les mises à jour régulières, consulter le site web du projet LHC.

Les conditions sont maintenant réunies pour tester tous les aimants dans ce secteur à leur meilleure performance.

1. Le CERN, Organisation européenne pour la recherche nucléaire, est le premier centre mondial de recherche en physique des particules. Il a son siège à Genève et a actuellement pour Etats membres l'Allemagne, l'Autriche, la Belgique, la Bulgarie, le Danemark, l'Espagne, la Finlande, la France, la Grèce, la Hongrie, l'Italie, la Norvège, les Pays-Bas, la Pologne, le Portugal, la République slovaque, la République tchèque, le Royaume-Uni, la Suède et la Suisse. L'Inde, Israël, le Japon, la Fédération de Russie, les Etats-Unis d'Amérique, la Turquie, la Commission européenne et l'UNESCO ont le statut d'observateur.